Google+ Article deux: mai 2014

jeudi 22 mai 2014

22 mai 1885. Mort de Victor Hugo

Le 22 mai 1885 meurt Victor Hugo. Le peuple de Paris et de France rend alors hommage au grand écrivain.


En 1883, Victor Hugo est âgé de 81 ans. Il vient de perdre Juliette Drouet, sa maîtresse depuis près de 50 ans.

Il rédige alors ses dispositions testamentaires :

« Je donne cinquante mille francs aux pauvres.

Je désire être porté au cimetière dans leur corbillard.

Je refuse l’oraison de toutes les églises ; je demande une prière à toutes les âmes.

Je crois en Dieu ».


Il lui reste deux ans à vivre.
Dans la nuit du 14 au 15 mai 1885, l’écrivain est victime d’une congestion pulmonaire. Il déclare à ses proches : « C’est la fin. Elle sera la très bien venue ».

Dès le 17 mai, la foule, sachant le grand homme malade, se presse sous ses fenêtres. L’archevêque de Paris fait une tentative afin de réconcilier Hugo avec l’Eglise. Celui qui prône une foi sans Eglise l’éconduit fermement.

Le 19 mai, il a encore la force d’écrire : « Aimer c’est agir ».

Hugo s’éteint finalement le 22 mai 1885 à 13h27 à son domicile avenue Victor-Hugo (Hugo ayant eu l’honneur d’avoir une avenue à son nom de son vivant).

Les dispositions testamentaires de l’écrivain sont respectées. Cependant, le 23 mai, le Sénat et l’Assemblée nationale votent à la quasi-unanimité un projet de loi instituant les funérailles nationales pour Victor Hugo. On décide aussi du transport de son corps au Panthéon, le monument que la Révolution destinait à recevoir les cendres des grands hommes.
Georges Clemenceau déclare: "Il faut que ces funérailles aient un caractère national. En honorant Victor Hugo, la France s'honore elle-même".
Le 31 mai, un catafalque est exposé sous l’Arc de Triomphe avant le lendemain de transférer la dépouille au Panthéon. Une foule immense est entassée sur les trottoirs tout au long du parcours.

Lors des funérailles de Balzac, en 1850, Victor Hugo avait prononcé un discours dans lequel il avait déclaré : « Les grands hommes font leur propre piédestal ; l’avenir se charge de la statue ».





Rien de tel pour rendre hommage à un écrivain que de le lire. Voici quelques moments avec Victor Hugo sur notre blog:

lundi 19 mai 2014

19 mai 1874. Loi sur le travail des enfants.

Où l’on se demande si c’était vraiment mieux avant.


Où l’on se demande s’il ne s’agissait pas, après la Commune de Paris, de faire tout de même quelques concessions pour les « classes laborieuses ». Des concessions non sans un intérêt militaire puisqu’il s’agissait de récupérer au plus vite l’Alsace et la Lorraine et qu’il convenait donc d’avoir de bons futurs soldats dont les corps ne seraient pas usés avant l’âge adulte.



Source : travail-emploi.gouv.fr

Loi du 19 mai 1874 sur le travail des enfants et des filles mineures employés dans l’industrie

(Bulletin de l’Assemblée nationale, XII, B. CCIV, n°3094)



SECTION Ière

AGE D’ADMISSION. DUREE DU TRAVAIL



Article Ier : Les enfants et les filles mineures ne peuvent être employés à un travail industriel, dans les manufactures, fabriques, usines, mines, chantiers et ateliers, que sous les conditions déterminées dans la présente loi.


Article 2 : Les enfants ne pourront être employés par les patrons ni être admis dans les manufactures, usines, ateliers ou chantiers avant l’âge de douze ans révolus. Ils pourront être toutefois employés à l’âge de dix ans révolus dans les industries spécialement déterminées par un règlement d’administration publique rendu sur l’avis conforme de la commission supérieure ci-dessous instituée.


Article 3 : Les enfants, jusqu’à l’âge de douze ans révolus, ne pourront être assujettis à une durée de travail de plus de six heures par jour, divisée par un repos. A partir de douze ans, ils ne pourront être employés plus de douze heures par jour, divisées par des repos.


SECTION II

TRAVAIL DE NUIT, DES DIMANCHES ET JOURS FERIES

Article 4 : Les enfants ne pourront être employés à aucun travail de nuit jusqu’à l’âge de seize ans révolus. La même interdiction est appliquée à l’emploi des filles mineures de seize à vingt et un ans, mais seulement dans les usines et manufactures. Tout travail entre neuf heures du soir et cinq heures du matin est considéré comme travail de nuit.
Toutefois, en cas de chômage résultant d’une interruption accidentelle et de force majeure, l’interdiction ci-dessus pourra être temporairement levée, et pour un délai déterminé, par la commission locale où l’inspecteur ci-dessous institués, sans que l’on puisse employer au travail de nuit des enfants âgés de moins de douze ans.


Article 5 : Les enfants âgés de moins de seize ans et les filles âgées de moins de vingt et un ans ne pourront être employés à aucun travail, par leurs patrons, les dimanches et fêtes reconnues par la loi, même pour rangement de l’atelier.

Article 6 : Néanmoins, dans les usines à feu continu, les enfants pourront être employés la nuit ou les dimanches et jours fériés aux travaux indispensables. Les travaux tolérés et le laps de temps pendant lequel ils devront être exécutés seront déterminés par des règlements d’administration publique. Ces travaux ne seront, dans aucun cas, autorisés que pour des enfants âgés de douze ans au moins. On devra, en outre, leur assurer le temps et la liberté nécessaires pour l’accomplissement des devoirs religieux.

SECTION III

TRAVAUX SOUTERRAINS

Article 7 : Aucun enfant ne peut être admis dans les travaux souterrains des mines, minières et carrières avant l’âge de douze ans révolus. Les filles et femmes ne peuvent être admises dans ces travaux. Les conditions spéciales du travail des enfants de douze à seize ans dans les galeries souterraines seront déterminées par des règlements d’administration publique.



SECTION IV

INSTRUCTION PRIMAIRE

Article 8 : Nul enfant, ayant moins de douze ans révolus, ne peut être employé par un patron qu’autant que ses parents ou tuteur justifient qu’il fréquente actuellement une école publique ou privée. Tout enfant admis avant douze ans dans un atelier devra, jusqu’à cet âge, suivre les classes d’une école pendant le temps libre du travail. Il devra recevoir l’instruction pendant deux heures au moins, si une école spéciale est attachée à l’établissement industriel. La fréquentation de l’école sera constatée au moyen d’une feuille de présence dressée par l’instituteur et remise chaque semaine au patron.


Article 9 : Aucun enfant ne pourra, avant l’âge de quinze ans accomplis, être admis à travailler plus de six heures par jour, s’il ne justifie, par la production d’un certificat de l’instituteur ou de l’inspecteur primaire, visé par le maire, qu’il a acquis l’instruction primaire élémentaire. Ce certificat sera délivré sur papier libre et gratuitement.



SECTION V

SURVEILLANCE DES ENFANTS. POLICE DES ATELIERS


Article 10 : Les maires sont tenus de délivrer aux père, mère ou tuteur un livret sur lequel sont portés les noms et prénoms de l’enfant, la date et le lieu de sa naissance, son domicile, le temps pendant lequel il a suivi l’école. Les chefs d’industrie ou patrons inscriront sur le livret la date de l’entrée dans l’atelier ou établissement, et celle de la sortie. Ils devront également tenir un registre sur lequel seront mentionnées toutes les indications insérées au présent article.


Article 11 : Les patrons ou chefs d’industrie seront tenus de faire afficher dans chaque atelier les dispositions de la présente loi et les règlements d’administration publique relatifs à son exécution.


Article 12 : Des règlements d’administration publique détermineront les différents genres de travaux présentant des causes de danger ou excédant leurs forces, qui seront interdits aux enfants dans les ateliers où ils seront admis.


Article 13 : Les enfants ne pourront être employés dans les fabriques et ateliers indiqués au tableau officiel des établissements insalubres ou dangereux, que sous les conditions spéciales déterminées par un règlement d’administration publique. Cette interdiction sera généralement appliquée à toutes les opérations où l’ouvrier est exposé à des manipulations ou à des émanations préjudiciables à sa santé.

En attendant la publication de ce règlement, il est interdit d’employer les enfants âgés de moins de seize ans : 1° dans les ateliers où l’on manipule des matières explosives et dans ceux où l’on fabrique des mélanges détonants, tels que poudre, fulminates, etc. ou tous autres éclatant par le choc ou par contact d’un corps enflammé ; 2° dans les ateliers destinés à la préparation, à la distillation ou à la manipulation de substances corrosives, vénéneuses et de celles qui dégagent des gaz délétères ou explosibles. La même interdiction s’applique aux travaux dangereux ou malsains, tels que : l’aiguisage ou le polissage à sec des objets en métal et des verres ou cristaux ; le battage ou grattage à sec des plombs carbonatés, dans les fabriques de céruse ; le grattage à sec d’émaux à base d’oxyde de plomb, dans les fabriques de verres dits de mousseline ; l’étamage au mercure des glaces ; la dorure au mercure.


Article 14 : Les ateliers doivent être tenus dans un état constant de propreté et convenablement ventilés. Ils doivent présenter toutes les conditions de sécurité et de salubrité nécessaires à la santé des enfants. Dans les usines à moteurs mécaniques, les roues, les courroies, les engrenages ou tout autre appareil, dans le cas où il aura été constaté qu’ils présentent une cause de danger, seront séparés des ouvriers de telle manière que l’approche n’en soit possible que pour les besoins du service. Les puits, trappes et ouvertures de descente doivent être clôturés.


Article 15 : Les patrons ou chefs d’établissement doivent, en outre, veiller au maintien des bonnes moeurs et à l’observation de la décence publique dans leurs ateliers.



SECTION VI

INSPECTION


Article 16 : Pour assurer l’exécution de la présente loi, il sera nommé quinze inspecteurs divisionnaires. La nomination des inspecteurs sera faite par le gouvernement, sur une liste de présentation dressée par la commission supérieure ci-dessous instituée, et portant trois candidats pour chaque emploi disponible. Ces inspecteurs seront rétribués par l’État. Chaque inspecteur divisionnaire résidera et exercera sa surveillance dans l’une des quinze circonscriptions territoriales déterminées par un règlement d’administration publique.


Article 17 : Sont admissibles aux fonctions d’inspecteur les candidats qui justifieront du titre d’ingénieur de l’Etat ou d’un diplôme d’ingénieur civil, ainsi que les élèves diplômés de l’école centrale des arts et manufactures et des écoles des mines. Seront également admissibles ceux qui auront déjà rempli, pendant trois ans au moins, les fonctions d’inspecteur du travail des enfants ou qui justifieront avoir dirigé ou surveillé pendant cinq années des établissements industriels occupant cent ouvriers au moins.


Article 18 : Les inspecteurs ont entrée dans tous les établissements manufacturiers, ateliers et chantiers. Ils visitent les enfants ; ils peuvent se faire représenter le registre prescrit par l’art. 10, les livrets, les feuilles de présence aux écoles, les règlements intérieurs. Les contraventions seront constatées par les procès-verbaux des inspecteurs, qui feront foi jusqu’à preuve contraire. Lorsqu’il s’agira de travaux souterrains, les contraventions seront constatées concurremment par les inspecteurs ou par les gardes-mines. Les procès-verbaux seront dressés en double exemplaire dont l’un sera envoyé au préfet du département et l’autre déposé au parquet. Toutefois, lorsque les inspecteurs auront reconnu qu’il existe, dans un établissement ou atelier, une cause de danger ou d’insalubrité, ils prendront l’avis de la commission locale ci-dessous instituée, sur l’état de danger ou d’insalubrité, et ils consigneront cet avis dans un procès-verbal. Les dispositions ci-dessus ne dérogent point aux règles du droit commun quant à la constatation et à la poursuite des infractions commises à la présente loi.


Article 19 : Les inspecteurs devront, chaque année, adresser des rapports à la commission supérieure ci-dessous instituée.


SECTION VII

COMMISSIONS LOCALES


Article 20 : Il sera institué dans chaque département des commissions locales dont les fonctions seront gratuites, chargées : 1° de veiller à l’exécution de la présente loi ; 2° de contrôler le service de l’inspection ; 3° d’adresser au préfet du département, sur l’état du service et l’exécution de la loi, des rapports qui seront transmis au ministre et communiqués à la commission supérieure. A cet effet, les commissions locales visiteront les établissements industriels, ateliers et chantiers ; elles pourront se faire accompagner d’un médecin quand elles le jugeront convenable.

Article 21 : Le conseil général déterminera, dans chaque département, le nombre et la circonscription des commissions locales ; il devra en établir une au moins dans chaque arrondissement ; il en établira, en outre, dans les principaux centres industriels ou manufacturiers, là où il le jugera nécessaire. Le conseil général pourra également nommer un inspecteur spécial rétribué par le département ; cet inspecteur devra toutefois agir sous la direction de l’inspecteur divisionnaire.



Article 22 : les commissions locales seront composées de cinq membres au moins et de sept au plus, nommés par le préfet sur une liste de présentation arrêtée par le conseil général. On devra faire entrer, autant que possible, dans chaque commission, un ingénieur de l’État ou un ingénieur civil, un inspecteur de l’instruction primaire et un ingénieur des mines dans les régions minières. Les commissions sont renouvelées tous les cinq ans ; les membres sortants pourront être de nouveau appelés à en faire partie.



SECTION VIII

COMMISSION SUPERIEURE


Article 23 : Une commission supérieure, composée de neuf membres dont les fonctions seront gratuites, est établie auprès du ministre du commerce ; cette commission est nommée par le Président de la République ; elle est chargée : 1° de veiller à l’application uniforme et vigilante de la présente loi ; 2° de donner son avis sur les règlements à faire et généralement sur les diverses questions intéressant les travailleurs protégés ; 3° enfin d’arrêter les listes de présentation des candidats pour la nomination des inspecteurs divisionnaires.


Article 24 : Chaque année, le président de la commission supérieure adressera au Président de la République un rapport général sur les résultats de l’inspection et sur les faits relatifs à l’exécution de la présente loi. Ce rapport devra être, dans le mois de son dépôt, publié au Journal officiel. Le gouvernement rendra compte chaque année à l’Assemblée nationale de l’exécution de la loi et de la publication des règlements d’administration publique destinés à la compléter.



SECTION IX

PENALITES


Article 25 : Les manufacturiers, directeurs ou gérants d’établissements industriels et les patrons qui auront contrevenu aux prescriptions de la présente loi et des règlements d’administration publique relatifs à son exécution seront poursuivis devant le tribunal correctionnel et punis d’une amende de seize à cinquante francs. L’amende sera appliquée autant de fois qu’il y a eu de personnes employées dans des conditions contraires à la loi, sans que son chiffre total puisse excéder cinq cent francs. Toutefois, la peine ne sera pas applicable si les manufacturiers, directeurs ou gérants d’établissements industriels et les patrons établissent que l’infraction à la loi a été le résultat d’une erreur provenant de la production d’actes de naissance, livrets ou certificats contenant de fausses énonciations ou délivrés pour une autre personne. Les dispositions des articles 12 et 13 de la loi du 22 juin 1854, sur les livrets d’ouvriers, seront, dans ce cas, applicables aux auteurs des falsifications. Les chefs d’industrie sont civilement responsables des condamnations prononcées contre leurs directeurs ou gérants.


Article 26 : S’il y a récidive, les manufacturiers, directeurs ou gérants d’établissements industriels et les patrons seront condamnés à une amende de cinquante à deux cents francs. La totalité des amendes réunies ne pourra toutefois excéder mille francs. Il y a récidive lorsque le contrevenant a été frappé, dans les douze mois qui ont précédé le fait qui est l’objet de la poursuite, d’un premier jugement pour infraction à la présente loi ou aux règlements d’administration publique relatifs à son exécution.


Article 27 : L’affichage du jugement pourra suivant les circonstances et en cas de récidive seulement, être ordonné par le tribunal de police correctionnelle. Le tribunal pourra également ordonner, dans le même cas, l’insertion de sa sentence, aux frais du contrevenant, dans un ou plusieurs journaux du département.


Article 28 : Seront punis d’une amende de seize à cent francs les propriétaires d’établissements industriels et les patrons qui auront mis obstacle à l’accomplissement des devoirs d’un inspecteur, des membres des commissions, ou des médecins, ingénieurs et experts délégués pour une constatation.


Article 29 : L’article 463 du code pénal est applicable aux condamnations prononcées en vertu de la présente loi. Le montant des amendes résultant de ces condamnations sera versé au fonds de subvention affecté à l’enseignement primaire dans le budget de l’instruction publique.



SECTION X

DISPOSITIONS SPECIALES



Article 30 : Les articles 2, 3, 4 et 5 de la présente loi sont applicables aux enfants placés en apprentissage et employés à un travail industriel. Les dispositions des articles 18 et 25 ci-dessus seront appliqués auxdits cas, en ce qu’elles modifient la juridiction et la quotité de l’amende indiquées au premier paragraphe de l’article 20 de la loi du 22 février 1851. Ladite loi continuera à recevoir son exécution dans ses autres prescriptions.


Article 31 : Par mesure transitoire, les dispositions édictées par la présente loi ne seront applicables qu’un an après sa promulgation. Toutefois, à ladite époque, les enfants déjà admis légalement dans les ateliers continueront à y être employés aux conditions spécifiées dans l’article 3.


Article 32 : A l’expiration du délai susindiqué, toutes dispositions contraires à la présente loi seront et demeureront abrogées.

Charte: Article dix

En cette année électorale, il est plus que jamais nécessaire de rappeler à nos élus les principes de notre République. Il est plus que jamais nécessaire de leur rappeler leur mission. Face à la défiance grandissante dont ils sont l'objet il convient de leur montrer que nous, citoyens, attendons d'eux une conduite irréprochable dans la conduite des affaires publiques.


 
Article dix de la charte de représentant du peuple:

Dans les enceintes de l'Assemblée Nationale et du Sénat, tous les propos du représentant du peuple sont considérés comme ayant été prononcés sous serment.

mardi 13 mai 2014

Charte: Article neuf

En cette année électorale, il est plus que jamais nécessaire de rappeler à nos élus les principes de notre République. Il est plus que jamais nécessaire de leur rappeler leur mission. Face à la défiance grandissante dont ils sont l'objet il convient de leur montrer que nous, citoyens, attendons d'eux une conduite irréprochable dans la conduite des affaires publiques.


 
Article neuf de la charte de représentant du peuple:

Un représentant du peuple ne peut être le propriétaire d’un groupe de presse ou de tout autre forme de diffusion de l’information et ce afin de respecter les règles et la transparence du débat démocratique.

samedi 10 mai 2014

10 mai 1871. La France perd l’Alsace-Lorraine.

Suite à la débâcle militaire de l’Empire français face à la Prusse et par la signature du traité de Francfort, la France perd l’Alsace et le tiers de la Lorraine dont la ville de Metz.


La France abandonne des terres minières très riches et doit de plus accepter des conditions sévères pour le versement d’indemnités à ce qui est devenu l’Empire d’Allemagne.

Les Alsaciens et les Lorrains qui souhaitent rester Français ont jusqu’au 1er octobre 1871 pour se décider. Ils ont la faculté de transférer leur domicile en France et de s’y fixer.
Victor Hugo, encore une fois visionnaire, condamne les conditions imposées à la France par ses vainqueurs du jour:

« L’histoire dira quels ont été, dans l’affreux traité de 1871, les juges de la France. Ils ont fait une paix pleine de guerre. Ah ! les infortunés ! A cette heure, ils règnent ; ils sont princes, et se croient maîtres. Ils sont heureux de tout le bonheur que peut donner une tranquillité violente ; ils ont la gloire d’un immense sang répandu, ils se pensent invulnérables, ils sont cuirassés de toute puissance et de néant, ils préparent, au milieu des fêtes, dans la splendeur de leur imbécillité souveraine, la dévastation de l’avenir ; quand on leur parle de l’immortalité des nations, ils jugent de cette immortalité par leur majesté à eux-mêmes, et ils en rient ; ils se croient de bons tueurs et pensent avoir réussi ; ils se figurent que c’est fait, que les dynasties en ont fini avec les peuples ; ils s’imaginent que la tête du genre humain est décidément coupée, que la civilisation se résignera à cette décapitation, qu’est ce que Paris de plus ou de moins ? Ils se persuadent que Metz et Strasbourg deviendront de l’ombre, qu’il y aura prescription pour ce vol, que nous en prendrons notre parti, que la nation-chef sera paisiblement la nation-serve, que nous descendrons jusqu’à l’acceptation de leur pourpre épouvantable, que nous n’avons plus ni bras, ni mains, ni cerveau, ni entrailles, ni cœur, ni esprit, ni sabre au côté, ni sang dans les veines, ni crachat dans la bouche, que nous sommes des idiots et des infâmes, et que la France, qui a rendu l’Amérique à l’Amérique, l’Italie à l’Italie et la Grèce à la Grèce, ne saura pas rendre la France à la France. Ils croient cela, ô frémissement ! »
Victor Hugo, Mes Fils.



Certains ont-ils une plus grande conscience que d'autres? Celui que l'on qualifiait de "poète" pour le moquer s'est révélé finalement le plus fin des observateurs des choses de son temps. Il n'est jamais trop tard, à travers les années et les pages, pour tirer les enseignements des écrits du passé...


vendredi 9 mai 2014

Zemmour, la délinquance et le Japon.

Les sempiternelles chroniques prononcées par les sempiternels chroniqueurs. Comment donner à entendre à certaines personnes ce qu’elles veulent entendre et uniquement ce qu’elles veulent entendre. Comment faire prospérer son fonds de commerce.



Ecouter. Voir. Partager. Voilà la devise de RTL. Voici donc au lien suivant l'intervention de M. Zemmour du 6 mai 2014.

On peut adhérer ou non aux propos de M. Zemmour (les 4 administrateurs d'Article Deux, sauf reniement soudain de quelques principes, n'y adhèrent pas). Mais, au delà de cette adhésion ou non, il convient tout de même de souligner les limites de l'exercice de ce type de chronique. Tout doit aller vite, tout doit choquer, quitte à prendre quelques distances avec la rigueur argumentative.


On débute par remettre en cause la tyrannie des chiffres, des statistiques, en matière de délinquance, avant d'appuyer sa démonstration sur un taux d'incarcération par habitant et sa comparaison avec les Etats-Unis et le Royaume-uni. Les sources ne sont bien évidemment jamais citées et l’on ne peut que se demander pourquoi le chroniqueur choisit ces deux pays plutôt que l’Allemagne, la Turquie, l’Uruguay ou le Nigéria… Peut-être s’agit–il de ne sélectionner que des exemples qui valident sa thèse ?


On s’interroge sur la naïveté soudaine du chroniqueur d’expérience lorsqu’il déclare : « depuis l’arrivée de Valls à Matignon, les communicants sont au pouvoir… ». Inouï qu’un observateur du monde politique tel qu’Eric Zemmour ne se soit pas rendu compte du rôle des agences de communication dans les dernières décennies…


On use d’images frappantes pour effrayer le bon peuple auditeur de RTL. Le rappel des invasions barbares des siècles passés, les mots de « guerre », de « razzia », de « violence endémique », de « pillage », sont propre à marquer durablement les esprits…


On use d’une énumération éloquente et évocatrice des seuls responsables des actes délinquants. La liste est longue et regroupe tout ce qui n’est pas franchement blanc. Le chroniqueur, sans aucun doute pressé par le format des 3 minutes ne rappelle pas que la plupart des personnes qu’il désigne, ne lui en déplaise, sont françaises. Intégration. Immigration. On n’a pas le temps de faire le distinguo. Ce n’est pas le but. Comment s'appelle donc le fait d'assimiler une ethnie, une nationalité, une religion, un groupe social à un comportement condamnable?


On termine avec le cadre idyllique de pays aux sociétés « homogènes » sans que l’on sache ce qui se dissimule finalement derrière cet adjectif… Problème de temps ? Manque de courage ? Bref, le pays exemplaire maintenant est le Japon. On peut flatter l’honnêteté intellectuelle du chroniqueur qui évoque d’un mot rapide une forme de délinquance moins visible mais aux effets beaucoup plus dévastateur : la corruption. Mais le plus grave est la violence de rue, et si le Japon l’ignore (on est obligé de croire le chroniqueur sur parole mais puisqu’il est péremptoire c’est qu’il doit avoir raison), c’est qu’il a refusé l’immigration de masse de longue date. Le fait que ce repli sur soi ait engendré, au Pays du Soleil Levant, le nationalisme le plus exacerbé ayant entrainé, dans la première moitié du XXe siècle, le massacre de millions de personnes, dans une barbarie et une sauvagerie presque jamais égalées, ne rentre pas malheureusement dans l’analyse du chroniqueur.


Cette chronique ne surprend plus personne venant de M. Zemmour. C’est sans doute pour cette raison qu’elle est passée inaperçue. Mais c’est sans compter sur différentes associations qui attaquent ouvertement le chroniqueur et lui donnent sans aucun doute ce qu’il attendait: une exposition médiatique. Le chroniqueur lambda ne vit que de son image. Il est fondamental pour lui de se trouver sur le devant de la scène. Aussi, régulièrement, reviennent inlassablement les mêmes discours qui produisent les mêmes réactions. Le Buzz est là. Le donneur d'avis journalier trouve ses détracteurs qui brandissent les droits de l’homme et ses défenseurs qui brandissent la liberté d’expression. 

mardi 6 mai 2014

5 mai 1789 : ouverture des Etats Généraux à Versailles.

Quand plus rien ne va... Quand tout est bloqué... Quand on ne peut rien changer... On convoque tout le monde pour tenter de tout arranger...



En août 1788, le roi Louis XVI fixe la réunion des Etats généraux pour le printemps de 1789. La situation politique mais surtout financière du royaume demande des résolutions.


Les souverains français ont déjà eu recours à ces réunions des « représentants des ordres » de la nation pour obtenir des approbations, des conseils le plus souvent dans les heures les plus tragiques du pays : guerre de cent ans, guerres de Religion. La plupart du temps elles avaient été inefficaces.

La dernière réunion remonte à l’année 1614 et s’achevant dans la confusion, elle avait tourné au discrédit de cette forme de consultation.

Au début de 1789, on prépare ces Etats généraux par l’établissement de cahiers de doléances, dans lesquelles les Français prennent la parole et par l’élection de délégués représentatifs des « ordres » de la société.

Les cahiers de doléances montrent que les questions fiscales sont primordiales. Ils montrent aussi une hostilité à une administration arbitraire, aux droits féodaux, et aux impôts sur la consommation. Le Tiers état dénonce la puissance de la noblesse et reproche au clergé son exemption d’impôt. Le bas clergé se montre offensé par l’opulence et le luxe de la noblesse quand le haut clergé se plaint de la crise morale que traverse la société.

Bien peu d’électeurs ont participé aux choix de leurs représentants. Les petits contribuables ont été exclus des élections primaires mais surtout l’abstention a été très importante. 1139 députés sont désignés au mois de mars 1789 : 578 pour le Tiers, 291 pour le clergé et 270 pour la noblesse.

Les « ordres » ne se présentent pas en rangs unis. 90 députés nobles sur 270 sont acquis aux idées libérales. 200 membres du clergé sont également favorables aux idées de réforme. Le Tiers parait plus homogène malgré sa grande disparité : 200 avocats ou juristes, 100 négociants, 50 gros propriétaires, 11 nobles et 3 ecclésiastiques (aucun artisan et un seul paysan). Par décision royale et malgré l’opposition de la noblesse, le Tiers a vu son nombre de députés doubler, lui qui représente la grande majorité de la population.

L’ouverture solennelle a lieu le 5 mai. Le discours du roi déçoit car il ne fait mention d’aucun programme politique et ne répond pas aux questions que tout le monde se pose : chaque ordre délibérera-t-il séparément ? Chaque ordre n’aura-t-il qu’une voix unique (ce qui assurerait la défaite permanente du Tiers) ou votera-t-on par tête (ce qui permettrait des regroupements majoritaires) ?

Une crise de 52 jours s’ensuit. Le serment du Jeu de paume fait sortir le débat de l’impasse. La monarchie n’a pas su se réformer.

Charte: Article huit

En cette année électorale, il est plus que jamais nécessaire de rappeler à nos élus les principes de notre République. Il est plus que jamais nécessaire de leur rappeler leur mission. Face à la défiance grandissante dont ils sont l'objet il convient de leur montrer que nous, citoyens, attendons d'eux une conduite irréprochable dans la conduite des affaires publiques.


 
Article huit de la charte de représentant du peuple:

L’élection du représentant du peuple est le résultat du débat démocratique. Ce dernier repose sur des principes fondamentaux que le représentant du peuple s’engage à respecter et à défendre : a) Une école gratuite laïque et obligatoire jusqu’à 16 ans permettant d’assurer une bonne formation des futurs citoyens et de leur donner toutes les meilleures dispositions à la bonne compréhension des enjeux du débat démocratique. b) La liberté de constitution et d’expression de multiples partis politiques. c) Une presse libre et indépendante permettant la diffusion des différents courants de pensées politiques. d) Le suffrage universel, égal et secret.

lundi 5 mai 2014

Les Nouveaux Chiens de Garde.

Réactions à la diffusion du film, Les nouveaux chiens de garde, par la Chaine #LCP le 4 mai 2014 à 20h30. Si vous n'avez pas vu ce film... cherchez un moyen de le voir... très vite...


On doit pouvoir adresser sans aucun doute des reproches à ce film qui s’attaque au monde des médias, et principalement à sa collusion avec le monde des affaires. Il a cependant le mérite de mettre en évidence des pratiques et des situations bien dérangeantes sur le mode de fonctionnement de ce qui est tout de même un des piliers du régime démocratique. En effet, sans une presse libre et indépendante, l’information est faussée et n’assure plus au citoyen la possibilité d’affiner son opinion, de forger ses convictions.


Cependant, « le débat » qui a suivi la diffusion du film et qui avait pour but d’apporter un éclairage sur ses thèses, jette encore un peu plus le discrédit sur un univers médiatique décidément définitivement coupé de la réalité.


Déjà, sur le plateau, les trois invités, dont Eli Cohen et Franz-Olivier Giesbert, directement mis en cause dans le film, s’entendent parfaitement pour le démonter catégoriquement. Personne n’a eu visiblement l’idée, pour l’honnêteté du « débat », d’inviter le réalisateur ou un quelconque membre de l’équipe du film.


Eli Cohen, attaqué dans le film pour son manque de clairvoyance économique, bien qu’expert en la matière, ne propose comme contre-argumentation que de s’interroger sur l’identité de l’économiste qui le met en cause : « A quel titre met-on en doute mon intégrité et mon analyse ? Qui est celui qui juge négativement mon point de vue ? ». En l’occurrence, il s’agit de Frédéric Lordon, économiste, directeur de recherche au CNRS. Mais visiblement, cela ne suffit pas pour avoir le droit d’apporter une parole différente de celle de M. Cohen.


A ce propos, à quel titre intervient donc le concerné lorsqu’il passe à la télévision ? Le téléspectateur attend avec impatience que l’animatrice interroge M. Cohen sur le fait que l’on n’évoque jamais, lorsqu’il est invité sur tous les plateaux, ses liens avec les grandes entreprises et le monde de la finance. L’attente sera vaine. On laissera M. Cohen, cependant, expliquer son temps de présence mirobolant à la télévision pour enseigner les rouages de l’économie au bon peuple : c’est tout simplement parce qu’il est un « bon client » et qu’il est un vulgarisateur de « qualité scientifique ». La science n’en sort pas grandie au regard de sa persistance dans l’erreur.


C’est dommage mais on ne s’attarde pas même une seconde sur cette persistance dans l’erreur de tous les experts économiques à la télévision, dans la presse, à la radio, depuis des décennies. Comment expliquer que tous ces spécialistes ne doivent jamais rendre aucun compte et ne subir aucune conséquence professionnelle de leurs analyses erronées ? L’animatrice n’a pas prévu cette question sur ses fiches… Un problème de temps ? Non, bien sûr : sur LCP, « on a le temps de s’exprimer mais on n’a que 30 minutes ».


Franz-Olivier Giesbert ? Le grand, l’illustre FOG lance que le film est « vieux et con. » Il n’y a pas d’argumentation à chercher. Visiblement il ne veut faire aucun effort. FOG sait pertinemment qu’il existe plusieurs catégories de citoyens. Que tous ne sont pas égaux devant le traitement de l’information. Qu’il existe aussi sur cette question un déterminisme social. Il a très bien compris que les citoyens devant leur poste, à 22h30, un dimanche, regardant La Chaine Parlementaire, sont déjà des citoyens avertis. Il ne parviendra pas à les convaincre. De toute façon, ils sont bien peu nombreux. Pas besoin visiblement de se donner du mal donc. D’ailleurs, il coupe Dominique Wolton, spécialiste des médias au CNRS. Les propos de ce dernier sont décidément trop théoriques et trop longs : « Oh, on n’est pas là pour faire un cours ! ». Autant faire son numéro de vieux dandy à la parole crue. Tout jouer sur une attitude désinvolte qu’il pense symbole de franchise. Il assène assez vite que dénoncer les manquements des journalistes et leurs connivences avec le monde de la finance s’apparente aux délations de juifs pendant la collaboration. Point Godwin. Voilà de l'argumentation bien préparée et respectueuse des téléspectateurs.


FOG et Cohen se retrouvent tous les deux en un argument imparable : preuve qu’ils ne sont pas malveillants, qu’ils ne cherchent pas à manipuler le débat pour satisfaire leurs intérêts, … les « gens » ne les écoutent pas ! Le film leur accorde finalement bien trop de pouvoir puisque leurs thèses ne pénètrent pas le bon peuple qui y résiste encore et toujours. Internet, les blogs, c’est là que tout se passe désormais et les grands médias n’ont plus aucune importance dans le débat démocratique et économique. FOG s’énerve et attribue à Internet le rôle de virus qui contamine tout. N’est-ce pas là une trahison involontaire ?


La preuve de leur honnêteté intellectuelle repose donc sur le fait que les « gens » se détournent des médias traditionnels pour chercher une autre voix et restent attachés à des principes économiques archaïques, qu’eux rejettent. Puisqu’ils n’arrivent pas à leurs fins, c’est qu’ils sont forcément innocents. Im-pa-ra-ble. Si l’on hésitait encore entre malveillance ou simple incompétence, on se dit finalement qu’il ne faut peut-être pas choisir.


L’indépendance des journalistes ? « Le débat » aborde ce point. C’est vrai que le film pose de bonnes questions, tout de même, reconnait FOG. Mais c’est un faux problème. « Le vrai pouvoir c’est bien celui du capital ». Oui, il confirme ses paroles que le film reprend. Mais il s’insurge : sa citation est tronquée. Alors il complète : Il suffit de choisir son patron. CQFD. Un journaliste qui n’est pas content de la ligne éditoriale imposée par le propriétaire n’a qu’à démissionner. Voilà. Il est indépendant. Si l’on doutait encore que certains membres de nos élites médiatiques vivent dans une autre réalité, cette sentence fogienne nous éclaire un peu plus…


Finalement, toutes ces interventions n’ont pas été inutiles. Elles ont prouvé tout ce que le film dénonce, par un tour de table qualifié de « débat », où l’on entend qu’une seule voix : Autisme, Soumission, Mainmise de certaines personnes sur l’univers médiatique de notre pays.


Charte: Article sept

En cette année électorale, il est plus que jamais nécessaire de rappeler à nos élus les principes de notre République. Il est plus que jamais nécessaire de leur rappeler leur mission. Face à la défiance grandissante dont ils sont l'objet il convient de leur montrer que nous, citoyens, attendons d'eux une conduite irréprochable dans la conduite des affaires publiques.


 
Article sept de la charte de représentant du peuple:

Un représentant du peuple ne profite jamais de sa position à des fins personnelles, aux niveaux financiers, juridiques, commerciaux et s’engage par-dessus tout à ne jamais nommer ni à faire nommer des membres de sa famille, proche ou éloignée, à des postes qu’il a le pouvoir d’attribuer ni à entreprendre des démarches commerciales avec des entreprises salariant des membres de sa famille.

dimanche 4 mai 2014

Les lois et la sécurité...

Petit retour au XVIIIe siècle en réaction au dernier fait divers en date qui place à nouveau sur le devant de la scène le thème de la légitime défense.



«Les lois, faites pour le bonheur de tous, ne seraient observées par aucun, si les magistrats n’étaient armées de la puissance nécessaire pour en assurer l’exécution.


Sans cette puissance, les lois, violées par le plus grand nombre, seraient avec justice enfreintes par chaque particulier, parce que les lois n’ayant que l’utilité publique pour fondement, sitôt que, par une infraction générale, ces lois deviennent inutiles, dès lors elles sont nulles, et cessent d’être des lois ; chacun rentre en ses premiers droits ; chacun ne prend conseil que de son intérêt particulier, qui lui défend avec raison d’observer des lois qui deviendraient préjudiciables à celui qui en serait l’observateur unique. Et c’est pourquoi, si, pour la sureté des grandes routes, on eût défendu d’y marcher avec des armes, et que, faute de maréchaussée, les grands chemins fussent infestés de voleurs ; que cette loi, par conséquent, n’eût point rempli son objet ; je dis qu’un homme pourrait non seulement y voyager avec des armes et violer cette convention ou cette loi sans injustice, mais qu’il ne pourrait même l’observer sans folie.»

Claude Adrien Helvetius, De l’Esprit, Discours III, Chapitre IV, 1758.

samedi 3 mai 2014

Charte: Article Six

En cette année électorale, il est plus que jamais nécessaire de rappeler à nos élus les principes de notre République. Il est plus que jamais nécessaire de leur rappeler leur mission. Face à la défiance grandissante dont ils sont l'objet il convient de leur montrer que nous, citoyens, attendons d'eux une conduite irréprochable dans la conduite des affaires publiques.


 
Article six de la charte de représentant du peuple:
Un représentant du peuple est dans l’obligation de fournir avec exactitude et par voie publique le montant de ses dépenses assurées par les finances de l’Etat et des collectivités territoriales.

vendredi 2 mai 2014

Shifting Baselines.

Nous réagissons la plupart du temps aux évènements quand ils bouleversent brutalement nos critères moraux ou nos intérêts. Or, quand le changement se fait lentement, progressivement, nous nous adaptons finalement sans beaucoup réagir. Avant de nous rendre compte généralement bien tard, qu'un jour, la situation d'ensemble est devenue intolérable.


Les lignes mouvantes de nos critères de tolérance, nos Shifting baselines (expression d'un biologiste franco-américain Daniel Pauly) évoluent généralement lentement. 

Pourtant, les faits s'enchainent parfois et devraient sonner comme des avertissements. Prenons l'exemple, de l'Allemagne à partir de 1933.

Le 30 janvier 1933, Hitler est nommé chancelier en Allemagne. Ce dernier est le chef du parti nazi première force politique du Reich après les élections de 1932.

 Le 4 février, les préfets de police sont autorisés à contrôler la presse et les réunions des partis d'opposition.

Le 22 février, la police fait appel à des volontaires pour compléter des effectifs jugés insuffisants.

Après l'incendie du Reichstag, le 27 février, dont les instigateurs semblent être les nazis eux-mêmes, les libertés de presse, de réunion et d'association sont supprimées.

Les premiers camps de concentration sont créés. Dachau est ouvert le 20 mars par Himmler.

Le 23 mars, Hitler obtient les pleins pouvoirs.

Le 2 mai les syndicats sont démantelés.

Le 10 mai, dans de nombreuses villes d'Allemagne, les bibliothèques sont expurgées et l'on organise de vastes autodafés publics.

Le 28 mai, les biens du parti communiste sont confisqués.

Le 14 juillet, le parti nazi est proclamé parti unique.

Après toutes ses mesures politiques visant à la confiscation du pouvoir, viendront, à partir de 1935, les lois raciales concernant les Juifs.

En 1938, les mesures antisémites se multiplient. Le 14 juin, enregistrement des entreprises juives. Le 22 juillet, carte d'identité spéciale. Le 7 octobre, obligation de rendre son passeport.

L'assassinat du conseiller d'ambassade à Paris, Von Rath, donne le prétexte à un pogrom le 9 novembre 1938: la nuit de Cristal. Les nazis tuent 91 personnes, incendient 101 synagogues, pillent 7500 magasins. 35000 juifs sont emmenés dans des camps. Les nazis imposent par la suite une amende de 1 milliard de marks à la communauté juive en dédommagement des troubles de cette nuit là.

A partir de 1941, des groupes d’intervention, «einzatzgruppen», déciment les Juifs à la mitraillette lors des opérations militaires en URSS.

A la conférence de Wannsee en 1942, il s’agit de donner des moyens d’envergure considérable à la liquidation systématique des populations juives d’Europe.

Les hommes se jugent les uns les autres, au jour le jour. Ils s'observent et calquent leurs comportements sur ceux de leurs semblables. Et ils s'adaptent d'autant plus facilement à des actes, à des faits s'éloignant pourtant de leurs valeurs et de leurs intérêts, qu'ils se produisent lentement, progressivement...

Mesure après mesure, les lignes bougent dans tous les domaines: politique, économique, social... On ne commence généralement jamais d'emblée par exterminer des populations entières. On ne décide jamais d'emblée de supprimer tous les avantages sociaux dont jouit une population. On ne décide jamais d'emblée d'autoriser à nouveau l'esclavage. Mesure après mesure, on habitue les hommes à s'adapter progressivement à un nouvel état de fait. Avant qu'ils ne se réveillent un jour en se posant cette question: Comment a-t-on fait pour en arriver là?  


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Nous vous recommandons la lecture d'un ouvrage de Richard David Precht, dans lequel est développé (parmi bien d'autres) ce concept de shifting baselines: L'art de ne pas être égoïste, Pour une éthique responsable. Edition Belfond.

Pastiche: 2014, Année terrible?

Après les élections municipales et avant les élections européennes... Voici un modeste pastiche en guise de réaction... ou d'avertissement... Dans l’urne républicaine, dans la Nation, Tu jettes, misérable, des noms enflammés !...



2014, Année terrible?
Dans l’urne républicaine, dans la Nation,
Tu jettes, misérable, des noms enflammés !
Des cris des anciens tu fais de la fumée !
N’as-tu donc pas appris que ton seul protecteur,
C’est l’Etat de droit ? Signe de notre grandeur,
Nos lois ont fait de notre pays un modèle :

Quatre-vingt neuf, NON qui devient universel,
OUI qui détruit les volontés totalitaires.
Souviens-toi : Montesquieu, Diderot, Voltaire ;
Fouille tes souvenirs : Rousseau, Zola, Hugo,
Ils sont en ton âme et fondent tes idéaux :
Depuis ton jeune âge tes maitres t’ont fait don
De leur courage et de leur illustre raison.
Tout en eux est vertu, est à suivre en exemple.
Ils ont écrit pour toi, rends hommage à leur temple,
Car ils ont fait de toi un de nos souverains :
La Liberté, suprême héritage, est ton bien.
Ce trésor adoré ne te l’a-t-on transmis ?
Que l’offres-tu à son exécrable ennemi ?
L’Histoire n’est-elle pas sage et fidèle alliée ?
Philosopher n’illumine plus ta pensée ?
Où as-tu égaré ta foi de citoyen ?
Celle enseignée jadis avec force moyens
A l’école, au collège, au lycée, tout le jour !
Quoi ? Des discours maudits tu attends le retour !
Malheur, souffrance, terreur, horreur, grief, haine !
Ils te clament Grandeur ? La France sera naine !
Ils te clament Valeur ? Elle aura l’anathème !
Fierté Nationale ? Colère que tu sèmes
Car notre nation n’est qu’un creuset dans un isthme.
Quel est ton choix ? Fascisme, racisme, égoïsme
Ou Liberté, Egalité, Fraternité ?
Ton pays d’errants du passé est enfanté ;
Eh bien le sort du bouc émissaire est le tien.
Et tu nies tout cela, toi !
                 - Je ne comprends rien


jeudi 1 mai 2014

1er mai 1891: Massacre de Fourmies

En 1891, Fourmies est une commune du département du Nord où les trois quarts des 15000 habitants travaillent 12 heures par jour dans les usines de tissage, de filage, et de peignage de la laine.



Dans les années 1880, les conditions de travail se sont dégradées et les salaires, d’ailleurs souvent payés en retard ou amputés par des amendes diverses, ont baissé de moitié.
On décide d’une grève générale pour le 1er mai 1891 afin de revendiquer la journée de travail à 8 heures.
Le 30 avril, les patrons « à l’unanimité sauf un » dénoncent les agitateurs et affirment que la journée de 8 heures ruinerait totalement le pays. Des compagnies d’infanterie sont appelées en renfort pour épauler la gendarmerie.


Le 1er mai, les ouvriers sont dans la rue et forment des piquets de grève. Devant l’usine "La Sans Pareille" les gendarmes à cheval chargent, renversent des femmes et arrêtent des hommes. Les ouvriers répliquent par des jets de pierre. L’après midi, les cortèges sont plus nombreux et les gendarmes chargent une nouvelle fois. De nouveaux venus se massent sur la grande place. De jeunes gens semblent revenir d’une promenade traditionnelle qui consiste dans la région à aller cueillir l’aubépine pour leur fiancée. Ils chantent des airs populaires régionaux sans connotation révolutionnaire. Cependant un commandant de compagnie s’affole et ordonne le feu. La foule se disperse et on relève 9 morts : deux jeunes enfants, un homme de trente ans, six jeunes entre quinze et vingt et un ans (deux garçons et quatre filles).
Le drame devient une affaire nationale et marque durablement les esprits.
En France, le 1er mai devient un peu plus une date symbolique pour les revendications ouvrières.
Aux Etats-Unis, en 1886, les syndicats avaient choisi cette date, jour du renouvellement des baux et des loyers, pour lancer une grève générale en faveur de la journée de 8 heures. Des affrontements violents avaient eu lieu avec la police.
En 1889, le premier congrès de la IIe internationale avait décidé que le 1er mai serait une journée mondiale de revendication pour la journée de 8 heures, une journée de repos par semaine et la fin du travail de nuit. Le succès international des manifestations entraine la reconduction annuelle par la suite.
C’est en 1945, que le 1er mai devient un jour férié et payé.  

Hugo, Dernier jour d'un condamné. Préface.

En 1829, Victor Hugo publie un ouvrage intitulé Le dernier jour d'un condamné. Ce récit se présente comme le journal d'un homme dans l'attente de son exécution. Le passage suivant est un extrait de la préface ajoutée en 1832 par l'auteur lors d'une nouvelle édition.


Ceux qui jugent et qui condamnent disent la peine de mort nécessaire. D'abord, - parce qu’il importe de retrancher de la communauté sociale un membre qui lui a déjà nui et qui pourrait lui nuire encore. – S’il ne s’agissait que de cela, la prison perpétuelle suffirait. À quoi bon la mort ? Vous objectez qu’on peut s'échapper d'une prison ? faites mieux votre ronde. Si vous ne croyez pas à la solidité des barreaux de fer, comment osez-vous avoir des ménageries[1] ? Pas de bourreau où le geôlier[2] suffit.


Mais, reprend-on, - il faut que la société se venge, que la société punisse. - Ni l’un, ni l’autre. Se venger est de l’individu, punir est de Dieu. La société est entre deux. Le châtiment est au-dessus d’elle, la vengeance au-dessous. Rien de si grand et de si petit ne lui sied[3]. Elle ne doit pas « punir pour se venger » ; elle doit corriger pour améliorer. Transformez de cette façon la formule des criminalistes, nous la comprenons et nous y adhérons.


Reste la troisième et dernière raison, la théorie de l’exemple. - Il faut faire des exemples ! il faut épouvanter par le spectacle du sort réservé aux criminels ceux qui seraient tentés de les imiter ! Voilà bien à peu près textuellement la phrase éternelle dont tous les réquisitoires des cinq cents parquets[4] de France ne sont que des variations plus ou moins sonores. Eh bien ! nous nions d’abord qu'il y ait exemple. Nous nions que le spectacle des supplices produise l’effet qu’on en attend. Loin d’édifier le peuple, il le démoralise, et ruine en lui toute sensibilité, partant toute vertu[5]. Les preuves abondent, et encombreraient notre raisonnement si nous voulions en citer. Nous signalerons pourtant un fait entre mille, parce qu'il est le plus récent. Au moment où nous écrivons, il n’a que dix jours de date. Il est du 5 mars, dernier jour du carnaval. À Saint-Pol, immédiatement après l’exécution d’un incendiaire nommé Louis Camus, une troupe de masques est venue danser autour de l°échafaud encore fumant. Faites donc des exemples ! le mardi gras vous rit au nez.


Que si, malgré l’expérience, vous tenez à votre théorie routinière de l'exemple, alors rendez-nous le seizième siècle, soyez vraiment formidables, rendez-nous la variété des supplices, rendez-nous Farinacci[6], rendez-nous les tourmenteurs-jurés, rendez-nous le gibet[7], la roue[8], le bûcher, l'estrapade[9], l’essorillement[10], l’écartèlement[11], la fosse à enfouir vif, la cuve à bouillir vif ; rendez-nous, dans tous les carrefours de Paris, comme une boutique de plus ouverte parmi les autres, le hideux étal[12] du bourreau, sans cesse garni de chair fraîche. Rendez-nous Montfaucon[13], ses seize piliers de pierre, ses brutes assises, ses caves à ossements, ses poutres, ses crocs, ses chaînes, ses brochettes de squelettes, son éminence de plâtre tachetée de corbeaux, ses potences succursales[14], et l'odeur du cadavre que par le vent du nord-est il répand à larges bouffées sur tout le faubourg du Temple. Rendez-nous dans sa permanence[15] et dans sa puissance ce gigantesque appentis[16] du bourreau de Paris. A la bonne heure ! Voilà de l'exemple en grand. Voilà de la peine de mort bien comprise. Voilà un système de supplices qui a quelque proportion. Voilà qui est horrible, mais qui est terrible.


Ou bien faites comme en Angleterre. En Angleterre, pays de commerce, on prend un contrebandier sur la côte de Douvres, on le pend pour l'exemple, pour l'exemple on le laisse accroché au gibet ; mais, comme les intempéries de l'air pourraient détériorer le cadavre, on l'enveloppe soigneusement d'une toile enduite de goudron, afin d'avoir à le renouveler moins souvent. ô terre d'économie ! goudronner les pendus !


Cela pourtant a encore quelque logique. C'est la façon la plus humaine de comprendre la théorie de l'exemple.


Mais vous, est-ce bien sérieusement que vous croyez faire un exemple quand vous égorgillez[17] misérablement un pauvre homme dans le recoin le plus désert des boulevards extérieurs ? En Grève[18], en plein jour, passe encore ; mais à la barrière Saint-Jacques ! mais à huit heures du matin ! Qui est-ce qui passe là ? Qui est-ce qui va là ? Qui est-ce qui sait que vous tuez un homme là ? Qui est-ce qui se doute que vous faites un exemple là ? Un exemple pour qui ? Pour les arbres du boulevard, apparemment.


Ne voyez-vous donc pas que vos exécutions publiques se font en tapinois[19] ? Ne voyez-vous donc pas que vous vous cachez ? Que vous avez peur et honte de votre œuvre ? Que vous balbutiez ridiculement votre discite justitiam moniti[20]? Qu'au fond vous êtes ébranlés, interdits, inquiets, peu certains d'avoir raison, gagnés par le doute général, coupant des têtes par routine et sans trop savoir ce que vous faites ? Ne sentez-vous pas au fond du cœur que vous avez tout au moins perdu le sentiment moral et social de la mission de sang que vos prédécesseurs, les vieux parlementaires, accomplissaient avec une conscience si tranquille ? La nuit, ne retournez-vous pas plus souvent qu'eux la tête sur votre oreiller ? D'autres avant vous ont ordonné des exécutions capitales, mais ils s'estimaient dans le droit, dans le juste, dans le bien. Jouvenel des Ursins se croyait un juge ; Élie de Thorrette se croyait un juge ; Laubardemont, La Reynie et Laffemas[21] eux-mêmes se croyaient des juges ; vous, dans votre for intérieur[22], vous n'êtes pas bien sûrs de ne pas être des assassins !


Victor Hugo, Le dernier jour d'un condamné, Préface, 1832



[1] Lieu où sont rassemblés les animaux rares, exotiques pour l'étude ou la présentation au public

[2] Personne qui garde les prisonniers. La geôle est une prison, un cachot

[3] Ne lui convient pas. Du verbe Seoir, convenir

[4] Anciennement la partie d'une salle de justice où se tenaient les juges ou les avocats. Par extension, lieu où l’on rend la justice. Groupe de magistrats chargés de l’application de la loi au nom de la société

[5] Force avec laquelle l'homme tend au bien. Force morale appliquée à suivre la règle, la loi morale définie par la religion et la société.

[6] Magistrat italien du XVIème siècle connu pour sa sévérité dans l’application des peines.

[7] Potence où l'on exécute les condamnés à la pendaison

[8] Supplice qui consistait à attacher le criminel sur une roue après lui avoir rompu les membres. (Rouer de coups)

[9] Supplice qui consistait à suspendre le condamné au sommet d’une potence par une corde qu’on laissait se dérouler brusquement jusqu’à ce qu'il fût près du sol

[10] Couper les oreilles

[11] Déchirer en quatre un condamné en faisant tirer ses membres par quatre chevaux.

[12] Table où l’on expose les marchandises

[13] Principal gibet des rois de France au Nord-Est de Paris. On y laissait pourrir les corps des condamnés. Ce gibet sur plusieurs niveaux pouvait contenir jusqu’à une cinquantaine de condamnés. Les dernières exécutions dateraient de 1629.

[14] Annexes, supplémentaires

[15] Continuité, stabilité

[16] Remise

[17] « Retirer la gorge ». Décapiter

[18] Place de Grève. Place du centre de Paris (aujourd'hui place de l”Hôtel de Ville) où se déroulaient les exécutions

[19] En se cachant. A la dérobée. Avec dissimulation

[20] Début d’une citation tirée de l’Enéide de Virgile : « Discite justitiam moniti et non temnere divos ». Apprenez à connaître la justice et à ne pas mépriser les Dieux

[21] Magistrats du XVIIème siècle

[22] Conscience